TROMPÉS

DANS LA SERRE CHAUDE

TROISIÈME ÉDITION

Résistez les fausses solutions aux changements climatiques

Gaz Naturel

Promu par les bailleurs de fonds comme étant le « moins sale » des combustibles fossiles, le gaz naturel (méthane) est envore vanté comme étant un « carburant de transition » en prétendant qu’il peut être une « alternative » propre au charbon et au pétrole. Cependant, les preuves de fuites de méthane tout le long de la chaine d’approvisionnement, des puits jusqu’à la combustion, démontrent bien comment le gaz naturel contribue aux changements climatiques. De plus, même si la fuite de gaz n’était pas une réalité, le gaz naturel n’est plus moins cher que l’éolien et le solaire à l’autre bout de cette transition.21 À mesure que l’industrie continue à subir des pressions de la part des groupes pour la justice environnementale, l’expansion et la diversification des fausses solutions reliées au gaz naturel deviennent plus intenses.

En plus de son nom, le gaz naturel est plein de contradictions. L’industrie utilise une technique d’extraction extrême appellée « fractuation hydaulique, ou fracturation », là où un mélange toxique d’eau, de sable et de produits chimiques est injecté sous terre à très hautes pressions afin de faire jaillir le gaz et le pétrole piégés dans des formations géologiques. En même temps, là où le pétrole brut est extrait du sol avec la technologie de fracturation (comme dans le gisement de Bakken dans le Dakota du nord qui affecte les vies et les moyens de subsistance des peuples autochtones) le gaz naturel indésirable est évacué par le torchage.22 Parmi les impacts communautaires du forage et de la fracturation, on retrouve : des répercussions sur la santé de ceux et celles qui vivent près des puits et des stations de compression ; la contamination de l’eau, de l’air et du sol ; des séismes induits ; des routes encombrées et endommagées ; des femmes autochtones disparues et assassinées suite à l’apparition de communautés temporaires de travailleurs surtout masculins, appellées « camps d’hommes » ; et, autres impacts d’une économie de surchauffe et de récession.

Exporter du gaz naturel exige de l’infrastructure portuaire et de gazoduc. Les gazoducs peuvent avoir des fuites, prendre feu et faire explosion. Par ailleurs, les compagnies reçoivent souvent des droits d’expropriation pour saisir des terres et installer des pipelines à travers des territoires autochtones, des cours arrières, des fermes, des lieux sacrés et près des écoles, contre les objections des communautés. Avant de l’acheminer, le gaz doit être comprimé en un gaz naturel liquéfié (GNL) volatile dans des installations portuaires dangereuses. Le GNL est du méthane comprimé, en surfusion et qui peut être expédié outremer dans des gaziers géants. Le transport outremer du gaz naturel peut représenter jusqu’à 21 % de ses émissions de gaz à effet de serre.23

Une autre menace croissante pour le climat et la santé des communautés vient de la vente de la composante « humide » (le gaz naturel est surtout du méthane, mais il inclut des substances que l’on appelle du gaz humide) du gaz de fracturation aux usines pétrochimiques pour fabriquer des plastiques jetables. En plus des charges massives d’émissions de gaz à effet de serre,24 les installations pétrochimiques qui produisent des plastiques (c.-à-d., des craqueurs d’éthane) produisent des montants immenses de polluants atmosphériques dangereux, de la matière particulaire, du benzène, du toluène et autres toxines. Tout cela en plus de tous les impacts environnementaux et sur la santé causés par le forage, la fracturation, le transport et l’évacuation des déchets associés à la production de plastiques.

Le gaz naturel s’en vient dans une banlieue près de chez-vous

La plupart des plastiques sont fabriqués pour être jetables, ils pénétrent tous les aspects de nos vies et causent des centaines de siècles de tort. Les microplastiques se retrouvent dans la plupart des sources d’eau de robinet, dans l’ensemble de tous nos océans, dans notre nourriture et dans nos corps. Des études récentes ont démontré que nous mangeons et buvons assez de plastique pour fabriquer une carte de crédit à partir de ce que l’on ingère à chaque semaine !25 En plus des hydrocarbures utilisés pour formuler la résine, les plastiques contiennent différents métaux lourds et phtalates qui sont reconnus comme étant cancérogènes et perturbateurs endocriniens. La pollution par le plastique représente aussi une menace sérieuse pour les écosystèmes océaniques, avec d’immenses masses tourbillonnantes de plastiques dans chacun des océans de ce monde, tel que le Vortex de déchets du Pacific nord.26 Bien que les plastiques représentent moins de 8 % de l’utilisation mondiale du pétrole,27 et en dépit du rejet croissant par le public des plastiques non réutilisables, les « Supermajors » (principales sociétés pétrolières) perçoivent le plastique comme étant la plus grande source de nouvelle demande dans les années à venir, investissant ainsi des milliards pour en assurer sa croissance. Une nouvelle forme d’écoblanchiment pour les industries pétrolières et gazières, c’est l’hydrogène, qui est hyper-médiatisé comme étant une source d’énergie propre (voir Hydrogène).

Cependant, créer de l’hydrogène en forme pure sur la Terre exige autant d’énergie qu’il en utilise. C’est une sorte de publicité-appât par laquelle les promoteurs parlent de : « l’hydrogène propre » produit par de « l’énergie renouvelable » ; de « l’hydrogène gris » résultant de la combustion des combustibles fossiles ; et, de « l’hydrogène bleu » là où les émissions de dioxyde

de carbone (CO2) de la production sont captées et stockées (voir Hydrogène et Captage du carbone). Et pourtant, l’hydrogène est généralement produit à partir du gaz naturel, ce qui donne à l’industrie une autre excuse pour continuer le forage et à en tirer des profits.28

Finalement, lorsqu’on examine les causes des changements climatiques, les émissions de méthane causent beaucoup d’impacts. En comparaison avec le CO2, le méthane est environ 86 fois plus puissant dans ses effets immédiats, mais il disparait de l’atmosphère après une douzaine d’années, alors qu’une partie du CO2 émis de nos jours va continuer à causer des changements climatiques durant plusieurs siècles.29 Cependant, c’est maintenant que nous faisons face à des points de basculement critiques. Nous ne pouvons pas nous permettre plus d’émissions de méthane en ce moment, ni les impacts environnementaux et sur la justice climatique qu’elles vont continuer à produire par l’extraction, de l’expédition en allant jusqu’aux plastiques.

Energy Justice Network: energyjustice.net/naturalgas

Indigenous Environmental Network: ienearth.org

[21]         Stockman, L. (2019). Burning the gas ‘bridge fuel’ myth: Why gas is not clean, cheap, or necessary. Oil Change International. http://priceofoil.org/content/uploads/2019/05/gasBridgeMyth_web-FINAL.pdf

[22]         Schade, G.W. (2020, July 29). Routine gas flaring is wasteful, polluting and unmeasured. The Conversation. https://theconversation.com/routine-gas-flaring-is-wasteful-polluting-and-undermeasured-139956

[23]         Swanson, C., & Levin, A. (2020). Sailing to nowhere: Liquefied natural gas is not an effective climate strategy. Natural Resources Defense Council. https://nrdc.org/sites/default/files/sailing-nowhere-liquefied-natural-gas-report.pdf

[24]         Kelly, S. (2018, October 28). Why plans to turn America’s rust belt into a new plastics belt are bad news for the climate. Desmog. https://desmogblog.com/2018/10/28/petrochemical-industry-america-rust-belt-plastics-fracking-climate

[25]         Dalberg Advisors, de Wit, W., & Bigaud, N. (2019). No plastic in nature: Assessing plastic ingestion from nature to people. WWF. http://awsassets.panda.org/downloads/plastic_ingestion_press_singles.pdf

[26]         Lebreton, L., Slat, B., Ferrari, F., Sainte-Rose, B., Aitken, J., Marthouse, R., Hajbane, S., Cunsolo, S., Schwarz, A., Leviver, A., Noble, K., Debeljak, P., Maral, H., Schoeneich-Argent, R., Brambini, R., & Reisser, J. (2018). Evidence that the Great Pacific Garbage Patch is rapidly accumulating plastic. Scientific Reports, 8(1), 1-15. https://doi.org/10.1038/s41598-018-22939-w

[27]         World Economic Forum. (2016). The New Plastics Economy: Rethinking the future of plastics. http://www3.weforum.org/docs/WEF_The_New_Plastics_Economy.pdf

[28]         Kalamaras, C. M., & Efstathiou, A. M. (2013). Hydrogen production technologies: current state and future developments. Conference Papers in Science, 2013. https://doi.org/10.1155/2013/690627

[29]         IEA (2020). Methane Tracker 2020. International Energy Association. Retrieved February 15, 2021, from https://iea.org/reports/methane-tracker-2020